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Frédéric Valabrègue
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À l'Écluse, je humais les molécules de Sillans dans les feux de débroussaillage. Quand je bourrais à la fourche les flancs de mon brasier, il prenait une lueur de soufre. Je me racontais les années Nina en nourrissant les brûlis des talus. Je la prenais comme couleur et comme température. Je n'avais pas envie de faire son portrait mais de m'engouffrer dans son énergie. J'entrais à corps perdu dans la matière de l'insaisissable, avec son goût sur le bout de la langue. Mes lignes d'écriture lui couraient après.
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La véritable histoire de cette ville est celle de ses destructions successives et de son acharnement à se nier dans sa personnalité propre.
La véritable histoire de cette ville est celle d'une putain respectueuse dont toutes les amendes honorables ne rachèteront jamais la conduite. -
Laurel et Hardy, Mercier et Camier, Don Quichotte et Sancho Pança, Marius et Olive, Bouvard et Pécuchet : Agricole et Béchamel viennent ajouter leurs noms à une longue série de couples d'hommes installés dans notre imaginaire. Armand Agricole, cinquante ans, veut être amoureux. Il proclame tout haut : N'ai-je pas mangé tout mon pain noir? Mais la saison passe et c'est l'amitié qui se présente. Employés de bureau à la mairie de Marseille, l'un et l'autre anarchisants, Agricole et Béchamel jouent pour nous la comédie de l'amitié avec ses mensonges et ses tendresses, ses cruautés, ses crises, ses abandons. Roman curieusement sentimental, Agricole et Béchamel est aussi une chronique féroce de la vie de bureau, un parcours ému dans la ville aimée, une réflexion sur l'amitié des hommes.
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Dans le quartier de Bon-Secours, à Marseille, des jeunes gens se la jouent, se la racontent, se la pètent, en un romancement de leur personne, pétrifiés par leur dignité, tenant autour de leur roi-soleil, Antoine Ambrosi, une geste d'arrière-cour tissée par la gêne, la maladresse, l'amour-propre, l'espoir d'acquérir une tenue, une langue, une pensée. Mais peu à peu, leur superbe s'abîme sur de nombreux récifs, ceux de la carte du Tendre et de l'Utopie.
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C'est un village du sud de la France, mais ce pourrait être n'importe quel village français. Une lutte mordante s'envenime au sein du conseil municipal entre le maire sortant, notaire de la contrée, et la directrice de l'école primaire, Denise Amouroux. La campagne électorale est vite débordée par les rumeurs, les préjugés et les crispations venus de tout le pays, dans une surenchère d'intimidations et de violences.
Une campagne est une chronique romanesque, étonnamment précise, de l'amour, de l'attachement, comme des haines et des illusions qui traversent les territoires, les coeurs, les mémoires. Et qui font un village français aujourd'hui. La satire politique révèle l'interchangeabilité des discours et l'hypocrisie des comportements policés. Utilisant plutôt le non-dit que la dénonciation, le roman de Frédéric Valabrègue démarque la parole commune pour en surprendre les paresses et les intérêts cachés. La satire ne juge ni ne condamne, elle met l'accent sur la comédie des ignorances et des impuissances, occasionnant la drôlerie et le sourire navré. -
Marseille et les Marseillais sont les héros aimés et haïs de ce roman. Sur un mode peu ordinaire, entre imprécation et chant lyrique, la démesure et l'excès de Marseille sont ici grandiosement mis en scène et c'est un clochard vitupérant qui décrit tout ce qu'il voit et entend ou croit voir et entendre, à travers un discours heurté, ordurier. Loin des blagues rituelles, le lecteur est convié, passant du tragique au comique, à un examen mouvementé de la ville.
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«Une maladie brouillée par son imaginaire et pansée par une inflation de raisons... L'exercice de patience consisterait à les vérifier, à soupçonner leur complaisance ou leur paresse. Doutes et démentis effacent par petites touches une tentative d'autoportrait en soi-disant malade. Et aussi. Asthme est le bouc émissaire propice à ma santé. Je vis donc je râle. C'est le corps ajusté autour d'une fêlure devenue son tuteur.»
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Il a cinq ans, il a tous les âges à la fois. Il est sur les lieux de sa terreur. Il y retourne : le Vert-Clos, la maison et le jardin, ses frères, les parents, du paradis à la chute, de l'enfance indistincte, confuse et mouvementée, bombardée de couleurs, d'odeurs, de gestes et de mots, à l'enfance consciente et au temps compté. Ceci est un récit d'enfance, le récit d'un drame familial. Mais ce n'est pas uniquement l'enfance, un bloc d'enfance brute, c'est aussi la façon dont elle nous invente, quand nous tentons de la reconstruire à différentes époques, sans qu'aucune de ses versions ne nous paraisse définitive.
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Où, jeune débutant, à l'âge où l'on veut tout et plus encore, je suis entré en littérature en me lançant dans l'imitation effrénée et le calque éhonté d'un grand auteur.
Pourquoi je me suis attaché mot à mot aux itinéraires anciens de mon maître, voyageant avec un de ses livres le long de la cordillère des Andes, flanqué de deux bons compagnons de guignon et de déroute.
Comment j'ai scrupuleusement exploré les gouffres psychotropes de mon guide jusqu'à y contracter une distraction funeste pour la vie pratique.
Comment je me suis peu à peu lassé de mon exclusivité fanatique et avec quels arguments fielleux j'ai repoussé cette influence. -
Parti du Burkina, Abdou veut tenter le coup avec sa jeunesse sans état civil, ses fables de La Fontaine et son sac de malices.
Cherchant le passage du nord-est, il tend ses bouts de ficelle entre deux frontières et espère qu'en poussant la chanson ou un mot devant l'autre, la roue tournera pour lui jusqu'en Italie.