Ces dix-neuf textes sont écrits du fond d'une geôle. Poignants et remarquablement maîtrisés, ces aller-retours entre réflexions et sensations expriment le quotidien morne du prisonnier, écartelé entre le bilan de sa vie et de ses actions, et le vide glacial d'un avenir absent. Mais petit à petit le courage lui revient, et malgré des conditions désespérantes il se remet à écrire.
Un livre de résistance exemplaire.
« Se croire capable de partager cette expérience avec les autres est une entreprise perdue d'avance. » C'est dans la brûlure inapaisable de cette lucidité que Riss, directeur de la rédaction de Charlie Hebdo, entreprend le récit intime et raisonné d'un événement tombé dans le domaine public : l'attaque terroriste du journal le 7 janvier 2015. Tentative sans illusion mais butée de se réapproprier son propre destin, de réhabiter une vie brutalement dépeuplée, ce livre qui confronte la réalité d'une expression galvaudée - « liberté d'expression » - révèle aussi un long compagnonnage avec la mort. Et nous saisit par son très singulier mélange d'humilité et de rage.
On trouvera sous ce titre, voulu par l'auteur, les divers éléments qui composent le "Journal" que René Depestre a tenu durant son séjour à Cuba, de 1964 à 1978. Ce document, entièrement inédit, est exceptionnel sur le plan biographique : il constitue un journal intime, souvent très personnel, qui s'organise parfois en roman d'apprentissage. Il l'est également au niveau historique et sociopolitique, René Depestre s'y révélant en témoin capital mais aussi en acteur, maintes fois critique, de la révolution cubaine. D'une écriture originale, mêlant vision lyrique et lucidité réaliste, ce Cahier d'un art de vivre est surtout l'oeuvre d'un esprit passionnément épris de son époque, qui en témoigne en philosophe tout autant qu'en poète.
Manuscrit zéro est un livre inclassable. Où il serait question d'une année dans la vie d'une romancière. Un journal de création sous la forme d'une cristallisation: la cristallisation secrète d'un livre en devenir. Le manuscrit zéro telle la forêt profonde d'où jaillissent les histoires de Yoko Ogawa.
Dans Les Cercueils de zinc, Svetlana Alexievitch avait osé violer en 1989 un des derniers tabous de l'ex-URSS : elle dénonçait le mythe de la guerre d'Afghanistan, des guerriers libérateurs. Comme Svetlana Alexievitch le soulignait elle-même, l'Union soviétique était un État militariste qui se camouflait en pays ordinaire et il était dangereux de faire glisser la bâche kaki qui recouvrait les fondations de granit de cet État.
La vérité n'est jamais bonne à dire, Les Cercueils de zinc valut à son auteur un procès pour
"calomnie". Reste que sans ce livre on ne saurait rien de la guerre des Soviétiques en Afghanistan ni, vues de l'intérieur, des dernières années de l'URSS. Un témoignage capital du Prix Nobel de littérature 2015, dans une édition revue par l'auteur.
Bien avant la consécration de son travail par le prix Nobel de littérature en 2002, Imre Kertész a noté - sur une période de trente ans (1961 à 1991) - ses observations, ses pensées philosophiques et les aphorismes qui l'accompagnaient lors de l'écriture de ses premières oeuvres. A travers un dialogue avec Nietzsche, Freud, Camus, Adorno, Musil, Beckett, Kafka, et bien d'autres encore, Imre Kertész tente, de façon brillante, de penser l'holocauste, la modernité, la liberté et le totalitarisme.
Dès août 1914, Marie Curie sauve des milliers de soldats de la mort ou de l'amputation. Elle fait acheminer vers l'Avant, malgré le risque et contre les autorités, le matériel et les techniques des rayons X qui permettent la localisation et l'extraction des éclats d'obus. Elle ose emmener sa fille Irène, dix-sept ans, sur les routes en guerre puis la lâcher, seule, dans des hôpitaux de l'Avant.
Cette autobiographie traverse l'histoire de la Chine des années 1940 aux années 1980, une période au cours de laquelle le destin des individus a été malmené et parfois définitivement brisé par la politique. L'auteur, peintre, écrivain et universitaire est condamné comme droitier en 1957 pour avoir publié un article sur le Beau. Libéré en 1962, il sera de nouveau emprisonné après Tian'anmen. Poétique par moments, émouvant à d'autres, faisant preuve d'une constante retenue même face aux réalités les plus choquantes, cet ouvrage d'une grande force est un véritable condensé de l'histoire et de la culture chinoises contemporaines.
Quand Henry Bauchau, en 1954, entame ce Journal, il ne soupçonne pas qu'il lui faudra un demi-siècle et près de 3 000 pages pour y préméditer, y interroger et y refléter chaque étape de l'immense oeuvre en cours. Par ce premier volume (le dernier qui restait à paraître de cette édition complète), le lecteur s'aventure dans l'atelier d'un grand artiste en devenir, est témoin de ses tentatives, sa foi, son opiniâtreté dans le combat avec la peur d'échouer.
Le poète Mahmoud Darwich a donné une longue interview à la journaliste Ivana Marchalian, lui demandant expressément de la publier cinq ans après sa mort. La promesse a bien été tenue par la journaliste qui nous livre, dans un récit intimiste, les écrits à travers lesquels se dévoile le regard rétrospectif du poète sur sa vie et son oeuvre.
Son oeuvre est considérable dans bien des domaines, et fragmentaire. Sa vie aussi est fascinante. Bruno Tackels consacre un livre-monument à l'un des plus grands intellectuels européens du XXe siècle, lecteur total, clochard céleste, homme blessé : Walter Benjamin.
Ce journal évoque la naissance des personnages et l'apparition progressive des épisodes du récit en même temps que les événements de la vie de l'auteur qui ont pu influencer son écriture.
Le 1er mai 1990, Jean-Louis Gouraud quitte la région parisienne avec deux chevaux et entame un voyage qui va l'amener jusqu'à la Moscou soviétique après avoir parcouru 3333 kilomètres en 75 jours. Récit d'un exploit équestre, réflexion sur le temps et l'espace et portrait d'un empire où en chaque homme sommeille un cosaque.
Nina Berberova revient dans cet ouvrage sur l'affaire Kravtchenko.
La fabuleuse histoire de la chanteuse, grande interprète de la morna cap-verdienne, et celle d'un succès mondial qui a tardé à venir. A travers ce portrait, se dessine également l'histoire d'une ville, d'un pays et d'un genre musical.
Après la publication de son remarquable Journal de galère (1961-1991), Sauvegarde couvre les années 2001 à 2003 et revient sur un moment crucial, un des plus grands bouleversements de la vie dImre Kertész : sa distinction par le prix Nobel de littérature en 2002. Il y aborde la genèse de son roman Liquidation, le travail littéraire quotidien, limportance de la musique dans son existence, sa difficulté à concilier vie conjugale et vie décrivain, sa maladie de Parkinson, son rapport à la Hongrie nouvelle et à Israël et son départ pour Berlin. Mais avant tout, il ne cesse de se pencher sur ce qui le préoccupe et lui importe le plus : la littérature. Un témoignage dune sincérité radicale et dune sombre lumière.
Amoureuse d'un musulman étranger à sa communauté, une jeune villageoise du Bengale-Occidental va connaître l'enfer. Grand reporter et écrivain, Sonia Faleiro se rend sur place pour mener une investigation en profondeur.
Deux voyageurs français, à la fois écrivains, ethnologues et enquêteurs, s'engagent dans une filature de cinq mille kilomètres, en bus, à travers le Brésil, sur les traces de personnages exceptionnels restés dans l'ombre de la Grande Histoire, qui ont en commun d'être Noirs, descendants d'esclaves, et d'avoir participé, par leur courage, leur créativité et leur résistance, à l'édification de l'identité et de l'âme brésiliennes.
Voyageuse de toujours, écrivain de l'ailleurs depuis des décennies, Lieve Joris a traversé l'Afrique de part en part. Aujourd'hui elle poursuit son chemin. Sur les traces de ses amis du Congo, elle suit la nouvelle route du commerce jusqu'en Chine. Et les Africains sont bien là, au coeur des échanges internationaux et de l'avancée fulgurante de la mondialisation.
Consacré à la décennie 1990-1999, le quatrième tome du journal de Paul Nizon témoigne de la profusion de ses sources et révèle la diversité de ses inspirations. S'il a atteint l'âge de la maturité et de la consécration, il n'en reste pas moins un créateur en perpétuel devenir, toujours à la recherche de la forme d'expression la plus juste.
A la rencontre des secrets et des racines, Mâkhi Xenakis, l'auteur des Folles d'enfer et de Louise Bourgeois, l'aveugle guidant l'aveugle, part en quête des liens secrets qui relient son travail actuel de dessin et d'écriture à certains dessins de sa petite enfance. La peur, le vertige et la force de vie y sont récurrents. Chaque fois elle attrape ces instants, les pose et les fixe pour s'en échapper. Une forme de scansion s'installe alors dans ces deux textes de douleur et de guérison : « La petite fille » et « Jalousie ».
Ce journal traverse une décennie qui fut pleine d'épreuves pour Henry Bauchau. La parution trop discrète du Régiment noir, la faillite et la revente de l'institut privé de Montesano, dans lequel il s'était tant investi. La réinstallation à Paris et le travail en hôpital de jour, la prise en charge de celui qui deviendra "Orion" dans L'Enfant bleu, la colossale entreprise d'une biographie de Mao Zedong....
Dans ce cinquième tome des journaux du grand écrivain suisse vivant à Paris, on trouve de magnifiques portraits d'écrivains, des récits de rêves et rêveries ou des miniatures de villes invitant à un départ immédiat - mais aussi l'évocation de la souffrance ressentie par l'auteur quand il écrivait La Fourrure de la truite, ou encore celle d'une douloureuse séparation amoureuse. L'écriture, elle, est toujours lumineuse et triomphante.
A la rencontre de Simone Weil, philosophe, ouvrière, militante et résistante. De la guerre d'Espagne à l'usine, de l'exil à l'engagement au service de la "France libre", un itinéraire ardent et insoumis.
"Son nom est connu dans un cercle d'initiés qui la considèrent comme une icône de la pensée contemporaine et qui se ressourcent régulièrement dans ses écrits.
Je fais partie de ces personnes qui, par les hasards d'une amitié, à l'adolescence, ont eu la chance de tomber sur La Pesanteur et la Grâce, et, comme bon nombre d'étudiants, je le suppose, j'ai appris par coeur certains fragments qui résonnaient en moi comme des aphorismes de sagesse et de compréhension du monde. Pendant des années ce livre de chevet fut pour moi comme la boussole du marin au milieu de l'océan déchaîné.
Trente ans après, mes recherches sur Hannah Arendt me firent lire ou relire certains textes comme La Condition ouvrière et L'Enracinement. Je fus, de nouveau, frappée par sa profondeur d'analyse, son courage physique et intellectuel, la pertinence de ses propositions, son mystère aussi, ce mystère d'une vie brisée à trente-quatre ans dans le feu de la recherche de la vérité.
Aujourd'hui, nous avons besoin de la pensée de Simone Weil, de sa clairvoyance, de son courage, de ses propositions pour réformer la société, de ses fulgurances, de ses questionnements, de son désir de réenchanter le monde."